« La Colère dans le Vent », de Ami Weira dénonce le scandale de l’uranium

Qu’est-ce qui vous a motivé à réaliser le film-documentaire « Colère dans le Vent » ?

La première motivation est née lorsque, pour la première fois de ma vie, j’ai visité la mine souterraine d’Arlit. Pour une fille de mineur, ce fut un grand choc ! J’étais d’un côté fascinée par le travail et de l’autre prise d’un grand remords. Celui de savoir que pendant toutes ces années, mon père et ses collègues travaillaient dans de telles conditions. Toutes ces années, mon père bravait au quotidien les dangers de la mine pour subvenir à nos besoins. Quand j’étais petite et que je le voyais partir au travail, je pensais qu’il allait dans un bureau. Loin de moi, l’idée qu’il allait dans les entrailles de la terre pour travailler. Un travail éprouvant. J’ai ensuite commencé à m’intéresser à la question de l’exploitation de l’uranium et ai découvert l’autre facette. C’est-à-dire les conséquences sanitaires et environnementales.

Et qu’avez-vous découvert ?

Mes recherches m’ont poussée à faire le lien entre cette exploitation de l’uranium et toutes ces maladies bizarres qu’on rencontre à Arlit.  J’ai compris aussi que le sujet de la radiation est tabou à Arlit. Les repérages du film m’ont pris beaucoup du temps à cause du caractère sérieux du sujet. Plus j’approfondissais mes recherches, plus je comprenais certains comportements  des syndicalistes ; des jeunes ouvriers qui réclamaient plus de droits. J’ai eu des cas de personnes qui ne peuvent plus vivre à Arlit et sont contraintes de partir loin  à cause de leur santé. J’ai aussi été témoin de naissances d’enfants malformés à Arlit et aussi de la dégradation continue de l’environnement. C’était face à tous ces exemples de conséquences de la radiation que j’ai décidé de réaliser ce film-documentaire. Il porte beaucoup plus sur les conséquences de l’exploitation de l’uranium sur la santé humaine et environnementale. Il parle de ce drame qui se joue en silence et qui touche plusieurs milliers de personnes. Ce film parle de nous. Ceux qui sont nés et ont grandi à Arlit. Il pose notre éternel questionnement. Celui de savoir pourquoi ce silence face à la radiation d’Areva à travers ses mines. Ce film ouvre le débat de notre survie après l’exploitation des mines.
Mes recherches m’ont poussée à faire le lien entre cette exploitation de l’uranium et toutes ces maladies bizarres qu’on rencontre à Arlit.

Vous donnez aussi la parole aux jeunes dans votre film, pourquoi ?

C’est même eux la deuxième motivation. J’ai été éblouie par le courage de ces jeunes rencontrés à Arlit. Ils se soucient déjà de l’après-mine ! Ils osent poser le débat qui fâche, c’est-à-dire celui de comment protéger Arlit et ses populations des méfaits de l’exploitation de l’uranium et prétendre à une meilleure prise en compte de la santé de la population !

Selon vous, qu’est-ce que ce film a apporté comme solutions à tous les problèmes liés à l’exploitation de l’Uranium ?

Ce film-documentaire, sorti en août 2016, a été projeté dans plusieurs salles en Afrique et dans le monde. Il a ému beaucoup de gens. Il a eu le mérite de soulever le pan sur les conséquences négatives de l’exploitation minière au nord du Niger.
A mon avis, du côté d’Areva rien n’a changé. La société continue d’extraire son uranium comme à l’accoutumée, de le faire voyager d’Arlit en France en passant par le port de Bénin sans aucun souci des accidents qui surviennent sur les routes. Une seule chose est vraie aussi : Areva a changé de nom pour devenir Orano. Nous ignorons pourquoi. A mon humble avis, c’est peut-être pour se débarrasser de son honteux passé de pollueur et pilleur attitré de ressources du plus pauvre pays du monde.

Interview réalisée par
Ramdane Guidigoro

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