Plusieurs étudiants de l’Université de Maradi ont été arrêtés, ce samedi 22 octobre 2022, lors d’une manifestation qu’ils ont organisée dans la ville. Parmi eux, des membres de l’exécutif de la structure dirigeante des étudiants de ladite université, ainsi que plusieurs autres étudiants. Des blessés ont également été enregistrés parmi les universitaires lors de cette manifestation. Ce que condamnent les syndicats des étudiants et l’association des parents d’élèves qui exigent leur prise en charge et la libération de ceux qui ont été arrêtés.
Après plusieurs jours de boycott des activités académiques (exceptés les examens) sans suite favorable, les étudiants de l’Université Dan Dicko Dankoulodo de Maradi (UDDM) ont opté pour une manifestation afin de se faire entendre. Dans leur mouvement, ils défendent le maintien de la « section Pharmacie » de leur université. Une section dont, le 07 septembre 2022, le ministre de tutelle a ordonné la fermeture (et son transfert à l’université de Niamey) avec plusieurs facultés des universités d’Agadez, Diffa, Dosso et Tillabéry dans le cadre d’une restructuration des universités publiques.
Après l’échec des premières démarches pacifiques consistant au boycott des activités académiques, les étudiants étaient sortis samedi et ont fait irruption dans la salle où se tenaient les assises du Conseil fédéral du PNDS TARAYYA, parti au pouvoir, avant que la situation ne dégénère. Plusieurs personnalités du pays prenaient part à ces assises, dont le haut représentant du Président de la République.
« Le comité exécutif de l’UENUM, représenté par le Secrétaire Général accompagné de son STAFF (une dizaine) s’est rendu sagement sur le lieu (du conseil fédéral du PNDS – ndlr) pour transmettre son message au Président de la République à travers son haut représentant. Malheureusement, ces autorités ont autorisé les forces de défense et de sécurité à arrêter le Secrétaire Général ainsi que les camarades qui l’accompagnent », ont expliqué les étudiants dans une note émanant de leur structure dirigeante, en l’occurrence l’Union des Etudiants Nigériens à l’Université de Maradi (UENUM). Selon la note, il s’agit, entre autres, du secrétaire général du comité exécutif de l’UENUM, du directeur général de la Commission des Affaires Sociales et de l’Ordre (CASO) ainsi que du Secrétaire chargé aux Affaires Culturelles et Sportives (SCAS).
Informés de cette situation, poursuit la note de l’UENUM, « les étudiants de toutes les cités sont sortis pour exiger la libération immédiate de leurs camarades et la situation s’est dégénérée », avec notamment l’intervention de la police qui a fait usage de gaz lacrymogène pour disperser les manifestants. Ce qui a débouché sur l’interpellation de plusieurs autres étudiants, dont le nombre n’est pas encore connu, tandis que d’autres ont été blessés.
Même si les étudiants défendent s’être rendus dans la salle du conseil fédéral du parti rose pour véhiculer pacifiquement leur message, d’autres sources affirment le contraire, évoquant la volonté des étudiants à perturber les assises dudit conseil.
La libération des étudiants détenus et la prise en charge des blessés exigées
Le Comité Directeur de l’Union des Scolaires Nigériens (CD/USN), le plus grand syndicat des étudiants et scolaires, a condamné, dans un communiqué publié le 22 octobre, l’usage de gaz lacrymogène par la police lors de ces manifestations. Le syndicat exige également la libération immédiate des étudiants arrêtés et la prise en charge des soins, par les autorités régionales de Maradi, de ceux qui ont été blessés.
Même réaction du côté du bureau exécutif national de l’Association National des Parents d’Elèves et Etudiants (BEN/ANPE/E) qui s’est réuni ce 23 octobre, suite à ces manifestations et en vue d’examiner la situation des universités régionales. L’association des parents d’élèves et étudiants a déploré l’usage de la violence par les étudiants et les forces de l’ordre. Elle demande, ainsi, aux deux parties de « privilégier le dialogue pour parvenir à des solutions pacifiques et durables », mais aussi l’activation des cadres de concertation au niveau central et régional.
Les étudiants disent avoir tenté, par le passé, un dialogue avec les autorités régionales et essayé de rencontrer d’autres personnalités, dont le premier vice-président de l’Assemblée Nationale et le haut représentant du Président de la République, qui étaient de passage à Maradi. Ce qui n’a pas abouti et a donné suite aux manifestations de ce 22 octobre.
En vue de les dissuader dans ce mouvement, le ministre de l’enseignement supérieur, Mamoudou Djibo PHD, avait, le 21 octobre 2022, instruit les directeurs des centres régionaux des œuvres universitaires (CROU) des différentes universités du pays de suspendre aux étudiants les prestations sociales, notamment la restauration et le transport. Une décision qui a certainement attisé la colère des étudiants de l’UDDM.
Dans leurs différentes réactions, les étudiants et l’association des parents d’élèves et étudiants ont demandé au ministre de sursoir à cette décision.
La franchise universitaire autorisée aux FDS
Par une note en date du 22 octobre 2022, le recteur de l’université de Maradi, Dr. Sani Mamane, a autorisé la franchise universitaire aux forces de défense et de sécurité. Ladite autorisation restera en vigueur du 22 octobre au 22 novembre 2022. Et ce, pour « assurer la sécurité des personnes et des biens ainsi que le maintien de l’ordre sur l’ensemble des sites de l’université en raison de la situation instable qui sévit à l’UDDM », selon la note.
Une décision qui passe mal chez la structure syndicale estudiantine, l’USN. En effet, dans un communiqué de presse publié quelques heures après la prise de la décision, le CD/USN a réagi contre la décision rectorale.
Le CD/USN « dénonce la levée inopportune des franchises universitaires par le recteur de l’université de Maradi et exige la réhabilitation de ces franchises pour la sécurisation de nos camarades militantes et militants de l’UENUM », indique le communiqué de presse. « Sans quoi, le recteur engagera sa responsabilité sur toute autre éventuelle dégénérescence de la situation », ajoute le CD/USN, dans le même communiqué.
Il est évident que les dernières décisions du ministre de l’enseignement supérieur et du recteur de l’UDDM ne pourraient favoriser le dénouement de la situation face à la colère des étudiants. Au risque que cette situation s’élargisse aux autres universités du pays et impacte sur le bon déroulement de l’année académique, il urge d’y trouver des solution adéquates et durables. Les deux parties (autorités et étudiants) doivent trouver au plus vite un terrain d’entente, en faisant usage des moyens pacifiques, pour une meilleure continuité des activités dans les universités publiques.
Ahmadou Atafa
Air Info
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