Agadez : Les non-dits sur la découverte de la cache d’armes

Dans la nuit du 14 au 15 mai 2018, une spectaculaire saisie d’armes a eu lieu dans un petit hameau situé à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de la ville d’Agadez sur la voie menant à Tahoua. Une cache d’armes dévoile tout un arsenal de guerre. Aïr Iinfo vous dévoile les non-dits de cette scabreuse affaire.

Dans le cadre de l’enquête diligentée d’abord par les hommes du commissaire Issoufou Ali, directeur régional de la police d’Agadez, et ensuite confiée à l’un des meilleurs limiers que compte la police nigérienne, en l’occurrence le commissaire Daddy Gaoh, plus connu sous le sobriquet de « Jet Lee », plusieurs personnes ont alors été interpellées et placées en garde à vue.
Le 25 mai dernier, après une semaine d’investigations menées à Agadez, le commissaire Daddy Gaoh, directeur général de la police judiciaire (PJ) va alors quitter la cité de l’Aïr, avec un détour par Zinder pour Niamey. Pourquoi un tel exercice alors que son convoi pouvait emprunter l’axe Agadez-Tahoua? La raison est toute simple.
Le commissaire Daddy Gaoh et ses hommes avaient dans leurs valises toutes les armes et munitions saisies et douze personnes, présumées en lien avec l’arsenal découvert. Idem aussi pour la somme de 44 millions huit cent mille francs CFA retrouvés chez la femme d’un des prévenus. Les gens interpellés sont : Aghali Eguimi, le présumé chef de la bande, de Douma Algatroni, de Ghoumour Ibrahim Boula – de sa femme née Fatimata Mohamedine (relâchée après investigation), de Moussa Ibrahim Boula, de Ibrah Issifa, de Hassan Mohamed…etc. D’autres suspects comme Mitirane Issouf et Idriss Korey seraient aussi du lot des recherchés.

D’après nos investigations, c’est un proche de la famille des membres du groupe, plus précisément Souleymane Abdourahamane dit Akiki qui a informé la police de l’emplacement précis de la cache. Dans un audio qui lui ai attribué et dont Aïr Info s’est procuré copie, l’intéressé reconnait lui-même les faits en ces termes : « Oui, je l’ai fait ! Je les ai dénoncés parce que c’est ma mission de le faire. Celle de dénoncer tout celui qui veut porter préjudice à la paix dans ce pays. J’ai signé le cessez-le-feu après les accords de paix et ai décidé d’œuvrer pour la consolidation de cette paix. Rappelez-vous bien que Rhissa Ag Boula nous a intimé l’ordre après ces accords de ne jamais dépasser cette ligne de la paix et que tout celui qui n’obéit pas et se permet d’être en marge de ce processus de paix, eh bien, il nous appartient de le dénoncer aux autorités compétentes. Et cette « amana », je l’ai accomplie en toute âme et conscience. Je ne suis pas le seul dans ce cadre de dénonciation. Rappelez-vous de l’arrestation de la bande de Akli ; Adandjé …etc. Qui les a fait arrêter ? Qui les a dénoncés ? Sachez-le ! C’est bien Ghoumour qui a donné leurs coordonnées aux forces de sécurité. Ghoumour est un agent de renseignement comme moi. Il possède même un passeport diplomatique. Allez y vérifier ! Je suis avec vous mais vous me prenez pour un fou… ». Aux dernières nouvelles, après l’aveu de Akiki qui circule sur les réseaux sociaux, une femme, proche d’une des personnes interpellées l’a attaqué jusqu’à le blesser à la tête.
Au-delà de toutes ces supputations, plusieurs questions taraudent l’esprit de nombreux compatriotes à Agadez. Celles de savoir : « Quelles garanties a-t-on que ces armes appartiennent réellement à ce groupe ? La seule dénonciation de l’agent Akiki vaut-elle son pesant d’or ? A quoi peuvent servir ces armes découvertes ?». Selon notre analyse, elles pourraient bien servir au convoyage ou interception des marchandises prohibées.

Le convoyage et interception de la drogue : une activité lucrative dans le désert

En effet, ces armes découvertes ne sont pas destinées au petit banditisme local. Non ! Elles constitueraient un arsenal d’autodéfense quand le groupe convoie un chargement de drogue mais aussi de détournement quand un clan rival passe avec une « marchandise » convoitée.
La puissance de feu des intercepteurs fait que la « marchandise » est alors détournée pour être destinée à un autre client autre que celui à qui elle était destinée. D’après des recoupements d’informations opérés par Aïr Info tant à Agadez ville que dans certains campements situés à la lisière du désert, plus précisément, tout le long de la falaise de Tiguidit, des groupes de trafiquants se partagent maintenant cet espace. Bénéficiant des complicités tapies à Agadez et surtout à Niamey, des convois slaloment tranquillement au sud d’Agadez se moquant éperdument des patrouilles de forces de sécurité. « Écoutez, ces véhicules (Ndlr : des trafiquants de drogue) passent devant nos yeux le plus normalement du monde. Ils ont de l’assurance comme s’ils font un transport légal. Quand vous entendez des coups de feu, soyez sûrs que c’est un règlement de comptes entre eux », a confié à Aïr Info, un habitant de la zone.
En effet, il arrive qu’un convoi de drogue soit intercepté par un autre groupe rival sur sa route. S’ensuit généralement une course-poursuite pendant laquelle tonnent des armes lourdes. Il nous souviendra qu’un accrochage qui a opposé des « intercepteurs » à des trafiquants de drogue a eu lieu en avril 2017 à une quarantaine de kilomètres à l’est d’Agadez. C’était un convoi de onze véhicules 4×4 bourrés de drogue venant probablement du nord Mali et qui se dirigerait vers le Tchad ou la Libye. Mais la puissance de feu des trafiquants leur avait permis d’échapper à la souricière tendue par le clan de Amoumane et de ses hommes. On avait dénombré à l’époque, rappelez-vous, un mort et un véhicule cramé.

Des nouvelles routes vers des nouveaux horizons

Avec l’installation des forces de sécurité étrangères dans le nord du Niger, le circuit habituel des trafiquants a été dérangé. Il n’est plus aisé de le faire comme dans les temps. Les militaires français et américains y veillent. Les manœuvres des trafiquants se font désormais beaucoup plus bas. Pratiquement au nord-Est de la commune d’Aderbissinat. Ce département, large de 25.000 Km2, voisin à celui d’Ingall à l’Ouest, et d’Abalak (Tahoua) d’où lui vient le trafic de drogue issu du Nord Mali voit aussi son septentrion servir de zone de transit à de la drogue. Oui à Aderbissinat, un autre circuit prend forme. Il vient du sud c’est-à-dire de Zaria (Nigéria), en passant par Gandou après avoir traversé le département de Gouré, de Kellé, de Tesker, l’Est de Tanout, l’Est d’Aderbissinat, puis destiné à la Lybie.
En rappel, en juin 2017, après 270 kilomètres de course poursuite entre des trafiquants de drogue et des éléments de la Garde nationale en poste à Gouré 17 colis de chanvre indien, d’une valeur de 70 millions de F CFA et 3 millions CFA de billets de banque tout neufs ont été saisis.D’autres saisies non moins importantes ont été opérées courant de l’année par les forces de sécurité de la région d’Agadez précisément au poste de contrôle de la police d’Aderbissinat.

Des fonctionnaires de l’Etat indexés dans la persistance des trafics en tous genres

Nous ne cesserions jamais de le dire. Le trafic de drogue au nord du Niger et autres crimes organisés jouissent des complicités avérées au niveau de l’appareil de l’Etat lui-même. A commencer par le cercle de ceux qui sont appelés à réprimer tous ces trafics en tous genres : les forces de sécurité et les services de renseignement. Bien qu’il existe des loyaux et farouches répresseurs de ces combines dégueulasses, ceux qui vivent de ce business sont légion. Il n’est un secret pour personne que ces derniers, surtout ceux tapis dans les rouages de l’administration sécuritaire sont devenus riches comme Crésus. Ils se distinguent par leur boulimie incroyable du béton, alignant immeubles après immeubles dans des quartiers onéreux de la capitale Niamey. Le secret de ces gens est tout simple : ils monnaient aux « Caïds » du trafic de la drogue ou à leurs affidés des informations stratégiques obtenues du fait de leur position au sein de l’appareil de répression et ou de renseignement de l’Etat.
D’après certaines informations en notre possession, des agents de l’État et non des moindres seraient dans cette position. Ils aident de la plus vile et lâche manière ces trafiquants au détriment de la RÉPUBLIQUE et surtout de la CONFIANCE placée en eux par Elhadji Issoufou Mahamadou, président du Niger qui n’a jamais fait mystère de son implacable désir de combattre ce fléau qui fait le lit à l’insécurité, à la corruption …etc.
Jusqu’à quand cela va t-il durer ? Et comment faire pour émasculer le fût de tous les mensonges, de tous les faux-complots qui sont quotidiennement servis à l’exécutif dans le cadre de la lutte contre les crimes organisés au nord du Niger ?

Réalisée par Ibrahim Manzo DIALLO

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