Le Réseau des Journalistes pour les Droits de l’Homme (RJDH) tire la sonnette d’alarme suite à la récente modification de la loi sur la cybercriminalité au Niger rétablissant les peines d’emprisonnement. Affirmant que cela constitue « un net recul pour la liberté de la presse », le Réseau a appelé, samedi 15 juin, à une nouvelle modification de cette loi jugée liberticide par nombre d’observateurs.
Le 7 juin dernier, le chef de l’État a signé une ordonnance apportant des changements significatifs à la loi sur la cybercriminalité adoptée en 2019, puis modifiée en 2022 avec la suppression des peines d’emprisonnement. Cependant, avec la nouvelle modification apporté par le général Abdourahamane Tiani, désormais, les peines pour diffamation et injures via les moyens électroniques peuvent aller de un à trois ans de prison, assorties d’amendes pouvant atteindre cinq millions de francs CFA. Les sanctions sont encore plus sévères pour la diffusion de données perturbant l’ordre public ou portant atteinte à la dignité humaine, avec des peines de deux à cinq ans de prison et des amendes similaires.
Pour le RJDH, cette révision représente « un net recul pour la liberté de la presse et la liberté d’opinion consacrées par les instruments juridiques internationaux ». Le réseau rappelle que le pays avait choisi de dépénaliser les délits de presse afin d’éviter la détention des journalistes pour diffamation ou injure dans l’exercice de leur métier. Pour lui, la nouvelle ordonnance, en rétablissant et en aggravant les sanctions pénales, pourrait pousser les journalistes à l’autocensure par peur de tomber sous le coup de cette loi sévère.
Depuis l’adoption initiale de la loi réprimant la cybercriminalité, plusieurs journalistes ont déjà été poursuivis et condamnés pour des publications en ligne ou pour avoir relayé des articles d’autres médias. Le RJDH craint que cette tendance ne s’amplifie avec les nouvelles dispositions.
« […] la nouvelle loi va négativement impacter le travail des journalistes nigériens alors même que la plupart des média électroniques (Web TV et journaux en ligne) ainsi les personnes qui produisent des contenus reprehensibles le font a partir de l’extérieur ».
Dans ce contexte, le RJDH demande une révision de l’ordonnance du général Tiani « pour mieux assurer l’effectivité de la liberté d’expression et d’opinion pour les journalistes tout en respectant la dignité humaine et les exigences de sécurité ». Il appelle également les professionnels des médias à respecter l’éthique et la déontologie, et exhorte les citoyens à utiliser les réseaux sociaux de manière responsable pour préserver la paix et la cohésion nationale.
« Le RJDH reaffirme en toute circonstance son engagement indéfectible en faveur de la défense des droits des journalistes et la promotion d’un environnement médiatique libre au Niger », conclue le réseau dans le communiqué signé par son président, Abdou Tikire Ibrahim.
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Il est à noter que depuis la récente modification de cette loi, de nombreuses voix se sont élevées pour la dénoncer, la qualifiant de liberticide. Elle risque de porter un coup dur à une liberté de presse déjà éprouvée dans le pays, où deux journalistes sont actuellement emprisonnés. Selon le dernier classement annuel de Reporters Sans Frontières (RSF), le Niger a chuté de 19 places par rapport à l’année précédente, se retrouvant désormais à la 80e position sur 180 pays évalués, avec un score de 59,71.
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