Dans cet entretien exclusif, Assalek Ibrahim, Secrétaire Permanent de l’ONG HED-TAMAT, revient sur les débuts de l’organisation, la coopération fructueuse avec l’Allemagne et l’impact des projets sur les communautés locales. Il partage également sa vision pour un développement porté par les acteurs locaux et soutenu par des partenariats internationaux solides.
Aïr Info : Bonjour Monsieur Assalek Ibrahim. Vous avez récemment accueilli une délégation de la coopération allemande dans vos locaux. Cette visite marque certainement une nouvelle étape dans la solidité du partenariat entre HED-TAMAT et l’Allemagne. Pourriez-vous revenir sur les premières étapes de HED-TAMAT et le rôle clé de l’Allemagne dans le développement de l’ONG ?
Assalek Ibrahim : Bonjour, et merci pour l’occasion que vous m’offrez de revenir sur le cheminement de l’ONG HED-Tamat, de ses premiers pas, jusqu’à aujourd’hui. En 1996, des étudiants et des fonctionnaires, mus par leur volonté de contribuer à la réussite d’une mise en œuvre effective des accords de paix signés entre les mouvements rebelles de l’époque et les autorités nigériennes, avaient créé une association dénommée Homme-Environnement-Développement. L’objectif de cette association était essentiellement de contribuer à la reconstruction du tissu social, économique et culturel des populations directement affectées par les effets du conflit armé dont l’Aïr avait été l’épicentre. Il s’agissait alors, parfois dans l’urgence, de soutenir des initiatives d’autopromotion communautaire, des projets locaux de préservation de l’environnement ou d’appuyer des initiatives structurantes dans le secteur des services sociaux de base et les activités génératrices des revenus.
En 2000, précisément par Arrêté N° 165/MI/AT/DAPJ/SA du 21 juin 2000, le statut de l’association a évolué vers celui d’ONG conformément aux textes en vigueur. Avant même son agrément en tant qu’ONG, les responsables de la structure, à travers leurs relations personnelles ont approché plusieurs personnalités et institutions pour soutenir les actions que l’ONG compte mener au Niger. C’est à cette époque que remontent les premiers contacts avec Dr Christine Harth de Care Allemagne qui ont débouché par la suite, à un partenariat solide et fructueux à la fois pour l’ONG elle-même, mais aussi pour les groupes cibles. Concrètement, depuis les années 2000, les principaux projets et programmes structurants exécutés par l’ONG HED-Tamat ont été financés par le Gouvernement Allemand, notamment par le BMZ et le Ministère des Affaires Etrangères à travers Care Allemagne. Ces projets/programmes couvrent des thématiques diverses adaptées aux différents contextes et aspirations des communautés et respectueux des normes et procédures exigées par les autorités administratives et les services techniques étatiques concernés.
Après avoir évoqué l’impact de la coopération allemande sur les premiers projets de l’ONG, vous avez mentionné la confiance grandissante avec vos partenaires. Pouvez-vous nous expliquer comment cette coopération a évolué au fil des années et quel est son impact aujourd’hui sur les actions de HED-TAMAT ?
La Coopération allemande, notamment à travers les projets financés par le BMZ et le Ministère AA est, en terme de volume financier, le plus grand bailleur de fonds de l’ONG HED-Tamat. Au fur et à mesure des projets réussis, la confiance avec les partenaires allemands s’est renforcée, passant de petits projets de quelques centaines de milliers d’euros à des projets/programmes chiffrés en plusieurs millions d’euros.
L’impact majeur à retenir est que, du fait de la responsabilité de redevabilité de plus en plus grande envers les bailleurs et envers l’État nigérien, l’ONG a dû s’adapter en renforçant les capacités de son personnel en matière de gestion administrative et comptable, de monitoring, de rapportage et de communication. La collaboration avec la coopération allemande a enseigné à HED-Tamat les principes modernes de rigueur dans la gestion des conventions de financement et de respect des normes régaliennes exigées par les textes régissant le microcosme des ONG et Associations de Développement au Niger.
En parlant de partenariat, quelle est la vision de HED-TAMAT en matière de partenariat international, et comment ces partenariats contribuent-ils à votre travail sur le terrain ?
La vision de HED-Tamat, sur le plan local comme sur le plan international, se résume à une vérité universelle, simple et unique : l’Homme est le Frère de l’Homme. Peu importe le genre, peu importe la langue, peu importe la géographie, sans la solidarité, sans l’entraide et l’amour du prochain, l’humanité ne serait qu’une jungle plus farouche et plus impitoyable qu’une meute de fauves ! C’est pourquoi nous sommes convaincus que ce sont les relations de partenariat et de coopération entre les nations et les organisations, à quelque échelle que ce soit, qui garantiront le destin et le bien-être individuels et collectifs des personnes et des communautés. Les organisations et les pays donateurs ne font qu’accomplir un devoir moral et humaniste envers les communautés porteuses des projets de développement et d’autopromotion qu’elles acceptent de soutenir.
C’est à travers ces partenariats vertueux que l’ONG HED-Tamat met en œuvre ses projets au grand bonheur des communautés et en parfaite adéquation avec sa philosophie et dans le respect des divers contextes sociologiques et culturels de ses groupes cibles.
Lire aussi :
À Agadez, HED-TAMAT ouvre la voie de l’emploi à 213 jeunes formés dans des métiers diversifiés
Vous avez abordé l’importance des partenariats internationaux dans le succès de vos projets. En ce qui concerne les projets spécifiques soutenus par vos partenaires allemands, pourriez-vous nous détailler les projets clés actuellement en cours et leur impact sur les communautés locales ?
Actuellement, l’ONG met en œuvre deux importants projets financés par le gouvernement allemand à travers deux ONG allemandes. Il s’agit du projet « Prévention des conflits et renforcement de la cohésion sociale dans les zones touchées par la propagation des courants extrémistes, dans les régions de Tillabery, Tahoua, Agadez et Zinder au Niger » financé par le Ministère Fédéral Allemand des Affaires Etrangères à travers l’ONG allemande Help e.V, et le projet « Amélioration de La Sécurité Alimentaire et Renforcement de La Résilience des Communautés Agropastorales Face aux Changements Climatiques et à l’insécurité dans Huit (8) Communes de la Région d’Agadez Au Niger » financé par le Ministère Fédéral allemand de la Coopération Economique et du Développement (BMZ) à travers Care Allemagne.
Le premier projet intervient dans 66 communes réparties entre les Régions de Tillabéri, Zinder, Tahoua et Agadez. IL est mis en œuvre à travers les antennes de l’ONG basées à Niamey, Agadez, Zinder et Tahoua.
Le second projet couvre huit communes de la Région d’Agadez : Iferouane, Timia, Dabaga, Tchirozerine, Arlit, Ingall, Aderbissinat et Dirkou.
Ces deux projets avaient été conçus pour renforcer la résilience des communautés des zones confrontées à défis cruciaux liés d’une part, aux chocs d’ordre sécuritaire et climatique et, d’autre part, à un contexte économique difficile.
Avec l’évolution du contexte régional, comment HED-TAMAT voit-elle son rôle dans l’avenir du développement local au Niger, et quelles sont les priorités pour les années à venir ?
Comme je le disais plus haut, les contextes de mise en œuvre des projets sont caractérisés par leur complexité et l’acuité des défis auxquels sont confrontés les communautés. Les communes d’intervention situées dans les zones frontalières entre le Niger et le Mali sont en proie à une insécurité chronique. Les populations sont contraintes d’abandonner leurs terroirs et ont perdu l’essentiel de leurs moyens de subsistance. Les modes de vie des communautés déjà assez précaires bien avant les crises sécuritaires se trouvent complètement bouleversés. Certaines zones sont devenues inaccessibles, autant pour les sévices techniques étatiques que pour les acteurs humanitaires, ce qui accentue le désarroi et la désolation des populations.
Face à l’ampleur de tous ces défis, l’ONG HED-Tamat est plus que jamais consciente de sa responsabilité et son devoir de solidarité envers les communautés. C’est pour cette raison qu’elle se projette dans l’avenir comme un maillon essentiel de la chaîne du développement social, économique et culturel des populations nigériennes. Nous sommes en effet convaincus que « pour un développement local, il faut une force de développement locale ». Nous avons foi en la capacité de nos populations, si elles disposent d’un minimum d’accompagnement, à prendre en charge, elles-mêmes, leur autopromotion et booster leur potentiel de développement et de bien-être.
Les priorités demeurent l’amélioration de la qualité et de l’accessibilité des services sociaux de base, le renforcement des capacités organisationnelles des structures communautaires, l’appui aux activités et moyens de subsistance dans les secteurs primaire et secondaire, le renforcement de la culture citoyenne, la consolidation de la paix et la prévention des conflits…
Un message final pour vos partenaires et soutiens ?
Un grand merci à tous nos partenaires, proches ou lointains qui nous accompagnent, depuis des décennies pour certains. C’est le cas des ONG Allemandes Care Allemagne et Help e .V. Un hommage particulier aux Ministères fédéraux allemands des Affaires Etrangères et de la Coopération Economique et du Développement (BMZ).
Je n’oublie pas d’autres organisations internationales comme Oxfam, Unicef, Care International Niger-Burkina, ACF, World Vision, FAO, Coopération Espagnole, etc.
Je ne terminerai pas sans saluer l’engagement et la disponibilité constants des acteurs étatique, (autorités administratives, services techniques), la chefferie traditionnelle, des élus locaux et des collectivités, des responsables des organisations d’autopromotion et des communautés qui, au quotidien, apportent leur précieux concours dans la mise en œuvre de nos projets.
Great